Alain BRON à propos de son roman « Maux fléchés », éditions In Octavo,
Texte paru dans Livresque du Noir :
http://www.livresque-du-noir.fr/2011/05/maux-fleches-par-alain-bron/
Je trouve qu’il a quelque chose d’impudique à parler de son propre roman. Une fois publié, le roman échappe de toute façon à l’auteur. C’est pourquoi j’ai demandé à Quentin Cherrier d'en parler. Comment, vous ne connaissez pas Quentin Cherrier ? Quentin est pigiste de mots fléchés. Il habite un hameau au fin fond de l’Ardèche. Dans sa montagne, il vit seul, avec sa chatte Cléopâtre. Ah, mais le voilà qui arrive…
— Cher auteur, je tiens à vous dire, qu’étant le héros de votre roman « Maux fléchés »…
— Mince, il ne fallait pas le dire ! Je ménageais une chute pour cet article…
— Bon, c’est fait, c’est fait, hein ? Je voulais simplement dire qu’un beau jour d’hiver, un type, pas très loin de chez moi, se fait tuer à coup de fusil chasse. Pan ! Son voisin, Élie, est accusé du meurtre, mais la famille croit dur comme fer qu’il est innocent. Elle me demande de rétablir la vérité. J’hésite, parce que moi et les enquêtes… Je finis par accepter pour les beaux yeux d’Elsa. Elsa, c’est une femme magnifique qui…
— Au fait, s’il vous plaît, au fait !
— Bon. Je commence mon enquête, et là, des événements inattendus se produisent dans la vallée. Avec tout le respect que je vous dois, cher auteur, je tiens à vous signaler que vous m’avez fourré dans le pétrin avec des malfrats de la pire espèce, alors que vous, vous étiez peinard devant votre ordinateur. Une question, une seule : pourquoi un tel acharnement contre moi ?
— Cher héros, c’est la loi du genre. Si j’avais écrit une histoire à l’eau de rose, vous auriez continué à vous la couler douce au coin du feu. À dire vrai, mêler des truands à une histoire rurale, c’est comme faire ressortir la lumière d’un tableau en y ajoutant des ombres. Je voulais également une collision entre l’actualité du banditisme et le passé du pays, lequel se souvient des guerres de religion comme si c’était hier. Je reconnais vous avoir porté tort, mais c’est de votre faute aussi : vous montrez générosité et curiosité, deux qualités qui, combinées, deviennent, chez vous, un gravissime défaut.
— Facile, facile ! On se délecte de mes recettes de cuisine, on se gausse de mes horoscopes, on s’esclaffe de mes mots fléchés… En fait, vous avez tout pris de mes qualités pour vous faire mousser, vous, l’auteur. Et, entre nous, vous auriez pu confier toute l’enquête à la gendarmerie et me laisser tranquille.
— C’est en cela que mes polars se distinguent, cher héros. La narration est un tressage entre différents protagonistes qui ne se rencontrent parfois jamais. Le lecteur est donc seul à posséder une vue d’ensemble et à pouvoir se faire une idée de la chute…
— Foutaises ! Hypocrisie d’auteur ! C’est vous qui préparez les coups de théâtre. C’est vous qui distillez les indices pour que le lecteur ne le lâche pas le livre ! Et qui est la victime expiatoire de cette perversité littéraire ? Hein, je vous le donne en mille ? C’est moi, le héros, qui crapahute dans les vallées, qui s’épuise dans les traboules de Lyon, qui subit l’âpreté de la vie en montagne !
— Vous touchez là, cher héros, la corde sensible. Toutes vos tribulations ne sont, je l’avoue, que des prétextes à dire le fait social. Je tente en effet de décrire les relations humaines dans la montagne ardéchoise alors que l’agriculture se meurt, les services publics disparaissent…
— Je sais tout cela. Il faut faire des kilomètres en voiture pour avoir du pain, se faire soigner, poster une lettre…
— Ajoutez à cela l’apparition d’un étranger sur un lieu de vie et vous aurez un contexte perturbé à souhait.
— Je trouve ça fort de café ! Vous, vous jouez le réfractaire, l’homme en perpétuel deuil de ses illusions perdues, mais pendant ce temps-là, les personnages de vos romans se font les pires saloperies. Et vous êtes là, placide. J’aurais honte à votre place !
— C’est vrai, mon cher héros. Je ne condamne pas. Je ne m’attaque pas à des cibles, je les observe, je les mets en mouvement, je provoque une alchimie entre leur position sociale et leur vie sentimentale. Et comme dans mes autres romans, il arrive que dans le même chapitre je passe du badinage à la cruauté sociale, du drame personnel à l’humour. Voyez-vous, Quentin, la vie n’est pas toute noire ou toute blanche. Mes polars non plus. En tout cas, je vous remercie infiniment de m’avoir aidé à rédiger ce texte. Tenez, pour la peine, je songe sérieusement à vous mettre dans un prochain roman…
— Oh, non !
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Quentin,vous faites l'expérience de la dure vie de héros du roman que j'ai hâte de lire et que je vais trouver trop court,comme d'habitude.Ne croyez pas une seconde que je vous plains,en fait je me réjouis de vos tribulations et j'espère bien que votre "père"va vous entrainer dans une suite.
Rédigé par : Sophie Selles | 23/05/2011 à 16:18
J’ai aimé cette intrigue policière à l’impressionnant bouquet final, où se mêle grand banditisme et assouvissement de petites rancœurs. Mais aussi cette initiation romancée à l’Ardèche profonde, pimentée de versets de la bible, de recettes ardéchoises concoctées par un parisien, également auteur de définitions de mots croisés astucieuses et d’horoscopes bidons.
Rédigé par : michel | 06/11/2011 à 16:38