"Depuis plus de quinze ans, Quentin habitait au Chazel, un hameau immensément beau, immensément perdu en Ardèche. Sept maisons, un four à pain, une fontaine, un lavoir et un ruisseau capricieux dans une vallée où la végétation s’était déclarée reine." (page 9)
"Une écharpe de brouillard s’élevait du fond de la vallée et s’accrochait sans conviction aux branches de pins. Peu à peu, le chemin à mi-pente se découvrait. Quentin marchait sur une épaisse couche de feuilles mortes avec l’impression de flotter entre frênes, châtaigniers et alisiers." (page 43)
"Il descendit les quelques marches de pierre, passa le lavoir et le four communal et pénétra chez les voisins par une arche de granit quatre fois centenaire." (page 123)
— Et vous l’avez vu, ce visiteur ?
— Non, on n’a vu personne. On a mis ça sur le compte d’un chevreuil qui passe de temps en temps le long de la rivière.
Quentin se gratta l’aile du nez. Il avait souvent éprouvé ce sentiment étrange : être alerté et, en fin de compte, ne rien voir arriver dans le hameau. Une menace invisible est toujours plus angoissante que l’idée d’un chevreuil qui passe. Et dans la solitude de la montagne, il s’était inventé beaucoup de chevreuils. (page 33) (photo : Jean-Christophe Laforge)
*
"Son immeuble longeait la Rue Droite dans la vieille ville du Cheylard. Les pierres de granit gris ocre avaient entendu des siècles d’histoires. Rumeurs bourgeoises de la Renaissance, atrocités des guerres de religion, fureur des nazis. Elsa en savait quelque chose, elle qui accompagnait les touristes durant l’été." (page 46)
"Une mer déchaînée de monts, de sucs et de serres s’étendait à perte de vue. Au premier plan, les Boutières, et au loin, le Gerbier-de-Jonc, le Mézenc et la chaîne des puys." (page 145)
"— Quelle drôle de question ! En été, on peut traverser le Talaron à pied sans problème. Mais tu sais, le Talaron, il a ses gués, il a ses retenues, il a ses gouffres…
— Et les gouffres, ils sont profonds ?
— Il y en a un profond, intervint Vincent. Quand j’étais gosse, j’ai plongé dans ce trou plus souvent qu’à mon tour. Histoire de me montrer aux filles…
— Tutt-tutt-tutt ! Je t’ai pas souvent vu plonger ! Qu’est-ce que tu nous racontes là ? intervint Nicole, son épouse.
— Moi, j’ai pas plongé dans le gouffre ? Mais c’est pas banal d’entendre ça !
Quentin n’avait pas imaginé qu’une question aussi modeste allait déclencher un tel sursaut d’amour-propre." (page 251)
"Une fois douchés et restaurés, Quentin et Elsa firent une petite promenade sur le chemin de l’école, appelé aussi le Chemin des Cinq Sens. De nombreuses toiles et sculptures y étaient exposées pour le plus grand plaisir des promeneurs. Immense galerie à l’air libre de douze kilomètres, le chemin avait été rouvert par des fous de l’art in situ après cinquante ans de délaissement. Restaient, de part en part, des cairns créés par des artistes et des amoureux des signes." (page 255)
"Dehors tombait un grésil insidieux qui annonçait une neige plus lourde en fin de journée. La chatte passa le museau par la porte entrouverte, renifla l’air glacial et trouva plus raisonnable de rester au chaud." (page 267)
"Il y avait aussi l’esprit de la pluie. Celui qui, précédé de nuages gris et lourds comme des cuirassiers, s’abattait sur le sol et créait un déluge de boue en quelques secondes." (page 142)
"Le reflet d’Elsa se substituait à celui de Sue, son ex, dont l’image se désagrégeait peu à peu comme ces nuages d’été, hauts dans le ciel, effilochés par le vent du nord." (page 228)
*
*
*
"Un boletus edulis, s’il vous plaît. Au moment où Quentin se baissait pour le cueillir, l’air se mit à vibrer et, dans l’instant, un coup de feu retentit. Un projectile vint atteindre le tronc d’arbre juste au-dessus de sa tête et déchiqueta une bonne partie de l’écorce…" (page 118)
*
*
*
*
*
*
*
*
*
*
"Devant l'âtre, la poêle percée patientait. Sans plus attendre, Vincent sortit son couteau à lame recourbée et fendit la partie bombée des châtaignes pour qu'elles n'explosent pas à la chaleur." (page 70-71)
*
*
*
*
*
*
*
*
*
*
*
Voir aussi les lieux du roman à Lyon :
****************************************************************************************************************
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.