Lettre ouverte aux organisateurs de salons littéraires
Tout d'abord, je voulais vous remercier, vous qui, dans les villages, les quartiers, les villes, offrez une double occasion : celle donnée aux habitants de lire nos ouvrages, celle donnée aux auteurs de rencontrer les lecteurs. C’est autre chose que la loi du plus fort sur internet. C’est autre chose que la pratique impitoyable du business.
Merci de préférer un lieu couvert plutôt que des chapiteaux battus par les vents coulis et les pluies obliques. C’est vrai, dans les salles polyvalentes, les gymnases, il ne pleut pas. Mais, l’hiver, il fait froid. Alors, un petit coup de chauffage fait toujours grand bien à nos pauvres corps immobilisés de 9h à 18h derrière une table.
Merci de prévoir à déjeuner. Je sais qu’il est tentant pour les organisateurs de prévoir une salade de carottes, voire une macédoine de légumes, des chips, de la charcuterie et du camembert. Mais savez-vous que les bonnes choses répétitives deviennent à la longue exécrables ? Ah, une petite chose, c’est sympa pour les auteurs d’être nourris, mais pas pour les livres quand le plateau-repas est livré sur la table de dédicace.
Merci d’animer les lieux. L’intention, très louable, est d’attirer les lecteurs par toute sorte d’animations, chacun peut le comprendre. Attention cependant de ne pas couvrir les dialogues auteurs-lecteurs par une musique tonitruante, des interviews qui se perdent dans le brouhaha, des déclamations qui rendent sourd, des discours d’officiels interminables. Attention de ne pas transformer le salon littéraire en cour des miracles avec jongleries, lotos pour personnes âgées, jeux de cluedo, quizz (même littéraires), garderies pour enfants (j’en connais qui tueraient pour éviter les cris stridents de mômes mal élevés)…
Merci de nous faire découvrir les produits locaux. On ne saurait dire combien la France regorge de trésors. Néanmoins, la litanie miel-roman-saucisson-bd-ail-polar-cidre… oblige les auteurs à crier « Elle est belle, ma salade ! », « Ils sont bios, mes mots ! ». A quand le label Vegan (sans ogres et sans loups) pour la littérature ?
Merci enfin d’inviter les auteurs. Sans eux, en effet, il n’y aurait ni livres ni salons du livre. Attention cependant de ne pas se retrouver avec plus d’auteurs que de visiteurs, et quand il y a des visiteurs, avec des gens qui ne font que passer et qui prennent les auteurs pour du papier peint.
Enfin, ne prenez pas ces lignes pour de l’ingratitude. Penchons-nous plutôt ensemble sur les conditions de succès de telles manifestations, car les auteurs sont les seuls à pouvoir comparer les salons littéraires.

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Bibliographie d'Alain BRON :
https://alainbron.ublog.com/alain_bron_auteur/bibliographie/index.html
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